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| Le génie du christianisme, ouvrage apologétique écrit par Chateaubriand en 1799 |
Aux moments des obsèques du Pape François, le philosophe Luc Ferry et le politicien Daniel Cohn-Bendit se sont livrés à un mini-débat sur le sens actuel du christianisme et ce qu'il faut en attendre en tant qu'athées convaincus dont ils se réclament tous les deux sans même se poser la question de ce que signifie exactement l'athéisme, à savoir une posture qui consiste à ne pas croire en Dieu. Le célèbre physicien Albert Einstein qu'on ne peut suspecter ni de radicalisme religieux, ni de bigoteries, avait toujours eu la prudence de répondre à cette question par une autre bien plus pertinente : «Dites-moi ce que Dieu représente pour vous et je vous dirai si j'y crois !» Ce qui démontre qu'il est difficile et pour le moins précipité de se définir comme un adepte de l'athéisme si on n'est pas soi-même au clair sur l'expérience et la représentation que l'on se fait personnellement de Dieu, la notion de concept divin ayant un potentiel de subjectivisation tel qu'il est possible de dire tout et n'importe quoi, y compris son contraire. Passé ce préambule nécessaire, on peut s'intéresser au cœur du débat qui s'est tenu et définir comme l'a fait remarquablement Luc Ferry ce que le christianisme continue d'apporter à notre civilisation actuelle, très majoritairement non-croyante, encore moins pratiquante, et se réclamant d'un soi-disant athéisme sans en comprendre tout le sens véritable et bien plus profond qu'il n'y paraît.
Dans son livre sorti en 2013 et co-écrit avec le Cardinal Gianfranco Ravasi à la demande de Benoît XVI, Luc Ferry retient quatre apports sociétaux venant des Évangiles: 1) L'égalité des citoyens devant les lois républicaines qui découle de l'égalité des être vivants devant Dieu. 2) La notion de laïcité qui a permis de séparer les ordres spirituels et séculiers grâce au fait que la vie privée des croyants n'est pas codifiée religieusement par des rites et des sacrifices tels qu'on les pratique dans d'autres confessions comme le judaïsme ou l'islam, ce qui permet l'exercice d'une libre croyance intérieure sans interférer avec le développement d'une société civile démocratique et donc parfaitement laïque. 3) La philosophie de l'amour (lire l'article : «Aime ton prochain comme toi-même !») dont la source initiale est d'abord hébraïque, tout comme le Christ était hébreux (Lv 19:18). Quant au quatrième apport, selon Ferry, il concerne l'impossibilité absolue pour un homme de trouver la grâce et le salut divins lorsqu'il s'est adonné à idolâtrer l'argent, rappelant en cela la fameuse parabole exprimée par Le Christ face à un jeune homme riche lui demandant ce qu'il devait faire pour avoir la vie éternelle : «Il est plus facile à un chameau de passer par le chas de l'aiguille qu'à un riche d'entrer dans le Royaume de Dieu.» (Mt 19:23-26). En cela, le Christ expliquait que la dépossession est inévitable, déjà par le fait qu'elle est inhérente à notre condition de mortel et que, partant, il vaut mieux devenir humble et charitable plutôt que de se complaire dans l'orgueil et la puissance de l'argent qui corrompent les valeurs morales de vérité et de justice telles que l'a exprimées avec clairvoyance l'apôtre Pierre (1 P 5:8-9) à propos de l'incarnation du Mal : «Soyez sobres, veillez ! Votre Adversaire, le Diable, rôde comme un lion rugissant, cherchant qui il dévorera.» Même si le Christ n'en est pas l'auteur (et pour cause il en fut le martyre), cette dissociation entre Dieu et l'incarnation du Mal s'est faite par ses disciples après sa mort et constitue indéniablement un progrès anthropologique par rapport à l'Ancien Testament où Satan en tant que force maléfique, non seulement n'est pas incarnée, mais dépend totalement d'une prétendue volonté divine. Enfin, cette promesse de vie éternelle formulée pour la première fois par le Christ est loin d'être une mystification comme semblent le penser nos deux débatteurs, surtout Cohn-Bendit qui va jusqu'à se moquer de la résurrection en prétendant que ni Mélenchon, ni Le Pen, ni Macron ne sont Le Christ ressuscité. Sans blague ? Cet égarement intellectuel aurait pu éventuellement lui être pardonné du fait de sa judaïcité qui effectivement ne reconnaît pas la notion spirituelle de résurrection par la chair. Mais, de cette religion, il ne peut même pas s'en prévaloir puisqu'il se revendique comme un adepte de l'athéisme pur et dur. Résultat des courses: Luc Ferry remporte le débat haut la main sur un Daniel Cohn-Bendit, dit Dany le rouge, qui s'est exclu de la joute verbale par un carton aussi vermeil que son passé militant ;-)




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